Sainte-Croix en 14-18

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Une scierie à vapeur fonctionnait au bas du Combard. C’était une baraque en bois où « le père Moine » avait son matériel de battage, un gros arbre avec une scie circulaire. Mais elle allait être emportée en 1915 par les débordements de la Sereine qui détruisirent sa digue de protection. Les trois restaurants actuels existaient mais ils avaient parfois d’autres fonctions que celle de proposer le gîte et le couvert aux voyageurs.

L’actuel restaurant La Fontaine était l’hôtel-café Georges (du nom de son propriétaire Pierre Georges). Un atelier de charronnage était attenant à la salle de café et dépannait les véhicules tirés par des chevaux.

Benoît, fils de M. Georges, vendait les premières machines agricoles, ainsi que des vélos, des motos, des armes, et même des machines à coudre dans la maison actuelle de Karl et Cathy Dolfuss qu’il avait construite. Les machines venaient dans des caisses et le courageux mécanicien les remontait sur place !

L’actuel restaurant Chez Nous était tenu par Laurent Pélisson et son épouse qui « faisaient café-porte-pot ». M. Pélisson exerçait son métier de sabotier à l’arrière de la salle. Quant à l’actuel restaurant L’Entre-Deux, il avait été vendu en 1904 à M. Alamercery par M. Nallet qui le tenait depuis 1844. Il faisait fonction de débit de boissons et de tabac, d’épicerie et de mercerie. Dans le champ de l’actuel lotissement de l’étang venait de se dérouler la dernière course d’ânes en 1914 ... Cette manifestation, organisée par les familles bourgeoises du village, faisait l’objet d’un grand engouement depuis sa création aux environs de 1910. Un « pari mutuel » était organisé. Les cafetiers apportaient de nombreuses pièces de vin et dressaient buvette dans le champ. Les villageois se faisaient fort de ne pas les laisser ramener vides ! « C’était une grande fête » se rappelait M. Louis Georges, un habitant récemment disparu.

L’instituteur M. Briguet accueillait dans une seule classe près d’une cinquantaine d’enfants de 5 à 13 ans ! Il y en aurait même 56 en 1919 ! Cet afflux d’élèves avait obligé la municipalité à construire en 1903 la mairie-école que nous connaissons. Auparavant, les enfants étudiaient dans l’ancienne école située près du puits-fontaine à l’angle droit de la rue qui mène aujourd’hui aux lotissements de Gabet et de la Balme.

Le curé habitait le presbytère (actuels logements communaux et cantine de l’école). Sur les plateaux, quelques fermes occupaient les vastes espaces.

Le plateau Est était le plus habité, avec des maisons dans les secteurs du Lanchet, des Denières, du Morion, de la Tuilerie et surtout autour du château. La Poterie avait subi un incendie un peu avant 1914. Le sentier de la Cassière était très utilisé par les écoliers pour se rendre à l’école.

Le plateau Ouest était déjà très dispersé, avec la plupart des fermes que l’on connaît aujourd’hui.

La grande tuilerie du Grillet (photo) donnait du travail à plusieurs ouvriers de Montluel et de Sainte-Croix et fonctionna jusqu’en 1925.

Le Fouilloux, après avoir été une ferme-laiterie qui acheminait son lait à Lyon, était devenue une belle maison bourgeoise entourée d’un parc planté d’arbres rares (photo). En 1913 malheureusement, un incendie venait de détruire la plupart des bâtiments d’exploitation.

L’électricité n’allait arriver au village qu’en 1925, et l’eau beaucoup plus tard, en 1968 ! Mais le téléphone était déjà installé dans la commune puisque le maire Bruno Faure, également châtelain, en disposait à son domicile. Les habitants pouvaient téléphoner de la cabine publique qui était située dans le café Alamercery au bas du village. Autre « service public » : le lavoir installé au sortir d’une source au bord de la route de Montluel, aux environs de la station d’épuration actuelle, recevait les lavandières du village depuis sa construction en 1895. Les jeunes allaient se baigner un peu plus loin, au glacis du Moulin des Vernes, c’est à dire à l’endroit où le canal mouturier du moulin prenait un peu de son eau à la Sereine afin de faire tourner la dernière roue à aubes fonctionnant à Sainte-Croix (qui allait poursuivre son activité jusqu’en 1977). Pendant la « Grande Guerre », les habitants de Sainte-Croix furent affreusement éprouvés, comme dans la plupart des villages des campagnes françaises. La population qui comptait 315 habitants en 1911, en perdit 26 durant ces cinq années.

Des familles furent très durement touchées et perdirent deux de leurs enfants : il en fut ainsi de Jean-Marie et Louis HODIEUX, de Joseph et Philippe MAITRE, de Benoît et François PERRAS.

Tombèrent également dans cette guerre odieuse : Joseph BARATIER, Jean-Marie BILLON, Jules BLANC, François BLAYON, Marius BONAMANT, Jean-Baptiste BRUFFIN, Pierre COUTURIER, Antoine DECOLONGE, Claude DURAND, Paul GEORGES, Benoît GROSSET, Jean-Marie HUMBERT, Marius JOLY, Claude LIATOUT, Jean LUIRARD, Charles MEYET, Nicolas MORIN, Jean PENS, Jean-Marie PONTHUS et Jean RABATHEL.

Leurs noms figurent sur le monument aux morts, inauguré le 28 Août 1921 et construit grâce aux dons de 120 souscripteurs sur un terrain donné par l’ancien restaurateur Joseph Nallet.

M. Louis Georges, déjà cité, se rappelait, jeune enfant, avoir porté au maire de Pizay (où n’était pas encore installé le téléphone) le télégramme annonçant l’Armistice le 11 Novembre 1918.

Un autre habitant remarquable de Sainte-Croix, M. Emile Vaudant, se souvenait de Marius JOLY, soldat en permission, qui pleurait en parlant de ce qu’il avait vu : « Tu ne peux pas t’imaginer ce que c’est » , disait ce dernier ! Il se souvenait également d’un autre soldat de la commune mort à la guerre, « un brave garçon, dont la tête avait été séparée du corps par un obus. On n’avait jamais osé le dire à sa mère ». Il se rappelait aussi des moments où le maire devait aller annoncer le décès d’un enfant à sa famille : « Les pauvres mères pleuraient, pleuraient, ... », disait-il.

Oui, la "Grande Guerre", c’était cela, ici comme dans les autres villages, en ce temps comme aujourd’hui sur d’autres continents !

Ce petit discours, qui fut écrit par le maire Bruno Faure (photo) et paraît aujourd’hui désuet et emphatique, fut profondément ressenti par toutes les familles présentes le 28 Août 1921.

A noter

Voir aussi sur ce site : la journée du 11 Novembre à Sainte-Croix.